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AMC 35 Renault
Sam 24 Oct 2020 - 15:08
La petite histoire de l'AMC 35 ACG1
De son nom complet, l’Automitrailleuse de Combat modèle 1935 R type ACG1 fut utilisée par l'armée française et l'armée belge, sous la dénomination "Autoblindée", au cours de la campagne de 1940. Développée et construite par Renault au cours des années trente, ce véhicule devait être une réponse pour équiper rapidement les unités françaises en entendant l'arrivée du prometteur Somua S35. Mais il ne fut qu'une accumulation de complications en tout genre.
La genèse de l'idée
En 1931, la cavalerie française lance un nouveau programme d'armement qui définit trois catégories d'automitrailleuses. Le terme "automitrailleuse" utilisé au sein de la cavalerie désigne autant les véhicule à roues, les semi-chenillé et les blindés à chenilles. Le terme char est lui réservé corps d'infanterie. Chaque catégorie de véhicule a des caractéristiques propres (évoluant au cours des années trente) afin d'effectuer une mission précise au cours de la bataille.
La première est l'Automitrailleuse de Découverte ou AMD, véhicule à roues, rapide, légère et un armement antichar pour des reconnaissances à longue portée.
La deuxième, Automitrailleuses de Reconnaissance ou AMR, véhicule chenillé faiblement blindé et armé pour des reconnaissances à courte portée sur le front,
La dernière est l'Automitrailleuses de Combat ou AMC, véhicule d'abord semi-chenillé puis totalement chenillé, blindé et armé avec une arme anti-char.
Avec ce programme, il en découlera de nombreux véhicules, donc de grands succès que furent l'AMD 35 Panhard et le char Somua S35.
La genèse du char
En 1934, la société Renault conçoit un premier châssis d'AMC, désigné YR au sein de l'entreprise, la future AMC 34 YR. On monte sur le châssis différentes tourelles, dont entre autres, la tourelle monoplace APX 1 avec un 47 mm et la tourelle biplace APX 2 avec un 25mm. Mais à peine arrivé, ce dernier est déjà délaissé. Les officiers français ont revu leur copie et ont décidé d'augmenter le blindage de leur AMC à 40mm. Alors que le véhicule de Renault n'a que 20 mm, 12 exemplaires sont tout de même livrés, 6 avec la tourelle APX1 et 6 avec l'APX 2. Mais le développement du futur Somua risque de prendre du temps, et des impératifs militaires doivent être réalisés à cause de l'Allemagne. Il est demandé à Renault d'améliorer le châssis YR. Il doit pouvoir accueillir un nouveau moteur plus puissant de 180ch, diminuer sa pression au sol, augmenter le blindage à 25mm. La tourelle APX 2 y sera montée mais sera armée du futur 45 mm SA 35. 50 exemplaires sont rapidement commandés afin d'équiper les 3 Groupes d'Automitrailleuse (1er, 2e et 3e GAM) des 3 Divisions de Cavalerie.
La Belgique passe commande
Au début des année trente, l'armée belge est en cours de modernisation et est à la recherche de nouveau véhicule pour équiper leur escadrille de reconnaissance des régiments de cavalerie et des régiments de chasseurs ardennais nouvellement formés. Intéressée par l'AMC 34, un exemplaire sans tourelle, remplacée par une casemate en bois et lestée pour simuler le poids, est rapidement testé en 1934, en Belgique. Il est mis en opposition avec le tank Vickers medium mark F. C’est le véhicule français de Renault qui reporte la compétition grâce à son blindage de 20 mm (contre 13 sur le Vickers), et sa bonne mobilité sur route. Une commande de 25 exemplaires est signée. Mais comme la production de l'AMC 34 initiale a été arrêtée, le contrat se porte sur la future amélioration. La commande est réalisée en deux partie : une commande pour les châssis et une pour les tourelles. Ce genre de contrat est spécifique à la France car si le châssis devait être annulé les tourelles peuvent être réutilisées en fortification.
Les futures autos blindées lourds belges seront armées du canon anti-char belge de 47 mm FRC modèle 1932.
La Production
En 1934, 75 chars sont commandés à la société mais aucun prototype n'a encore été réalisé. Seul une maquette de 1/5e a été réalisée. Vue les importantes modifications à apporter, il faut concevoir un tout nouveau véhicule. Ce nouveau véhicule est désigné ACG1 par Renault. En 1935, 2 prototypes en acier doux sont mis en fabrication et en même temps, la production des 75 est lancée. La production est chaotique et va s'étaler sur 4 ans avant de pouvoir livrer les premiers chars en "état" de servir. Premiers soucis, l’approvisionnement du moteur ne dépasse pas 2-3 unités par semaines ce qui retarde la livraison. Puis, on découvre une erreur de conception sur les pignons de la boite de vitesse, mais le lot de boite est tout de même conservé afin d'éviter des retard. C’est peine perdue car les chars sortant avec devront retourner à l'usine pour être réparer. Puis, en 1936, des tests sur les premiers prototypes réalisés par une commission militaire française révèlent de nombreux défauts, et, afin de savoir si les améliorations sont bonnes, les tests se prolongent jusqu'en 1937. De plus, en 1936, les usines Renault sont touchées par les mouvements de grève et celles-ci sont bloquées suite à l'arrivée du Front Populaire. Les usines de fabrications de chars de Renault sont nationalisées et deviennent l'atelier de construction d'Issy-les-Moulineaux, abrégé en AMX. En 1937, c'est AMX qui doit assembler les ACG1 à partir des pièces de Renault déjà fabriquées. Le deuxième prototype y est assemblé, et permet de régler les problèmes constatés en 1936. Mais les chars sortant d'usine ont déjà des problèmes techniques dû aux pignons défectueux. Fin 1937, il faut arrêter le montage et attendre que tous les problèmes soient réglés pour reprendre. C'est seulement en juin 1938 que la production reprend et que les premières livraisons sont effectuées.
La tourelle APX 2
Première et unique tourelle biplace pour les chars français, elle permettait de libérer le chef de char du rôle de chargeur de canon.
Elle ne fut pas reprise pour le char Somua car son blindage était trop faible. Une tourelle avec 25 mm sur un châssis avec 40 mm de blindage n'était pas cohérent pour les officiers français et la France ne disposait pas le savoir-faire pour mouler une tourelle d'une épaisseur de 40 mm avec un volume suffisant pour accueillir 2 personnes. C'est donc une tourelle monoplace qui équipa les S35.
Il y eu 2 versions de tourelle: l'originale pour les français et une modifiée pour les belges.
Comme dis plus haut, la tourelle française est équipée du canon 47 mm sa 35 et de la mitrailleuse 7.5 MAC et la tourelle belge du canon de 47 mm FRC mod. 36 (adaptation du modèle de 1932) et de la mitrailleuse 7,65 mm Hotchkiss. La tourelle belge, APX 2 B, doit subir quelque modification pour pouvoir accueillir la mitrailleuse belge. L'installation du canon se fait sans soucis car le canon belge et français partage une filiation commune. Le souci de la mitrailleuse belge est qu'elle se recharge par la gauche. Le rechargement est alors gêné par l'optique de la plaque avant gauche. Cette optique est déplacée sur la plaque arrière et l'ancien emplacement est bouché par une plaque avec une fente de vision. L'espace libéré permet de recharger mais aussi de placer une lunette de pointage à gauche de la mitrailleuse. Une encoche est découpée au-dessus de la fente de mitrailleuse pour celle-ci. Le manchon de la mitrailleuse belge plus épais et avec un bourrelet à l'avant, différent de celui français, plus fin. Il s’agit des principaux éléments visuels permettant de différencier une AMC 35 français de l'ab.l. belge
Variante de l'ACG1
En 1935, il est demandé à Renault de construire à titre expérimentale un autocanon de cavalerie (ACC) sur base d'une des 50 futures AMC commandées. L'ACC doit être armé avec un canon de 75 mm ABS intégré dans la caisse du char et avec une tourelle équipée d'une mitrailleuse, comme le SAU 40 sur base du châssis Somua. Le prototype est mis en construction, sous le nom d'ACG2. Le prototype sort en 1937 mais sans le canon. En attendant la livraison du 75 ABS, le châssis est modifié, en 1938, afin de le transformer en char "fumigène" expérimental. L'ACG2 ne sera jamais terminé.
Les Livraisons
A cause des retards accumulés, les GAM qui devait initialement recevoir les AMC 35, reçoivent à la place des chars Hotchkiss H35. On ne sait donc pas trop ou les envoyer. En 1937, on prévoit de les expédier en Tunisie pour contrer la menace italienne. Mais après des expérimentations, on le juge inadapté pour une utilisation en Afrique du Nord. Cette même année le premier ACG1 est livré à la Belgique. Les officiers belges sont consternés car l'auto-blindé est trop lourde et trop lente, inadaptée sur le terrain accidenté ardennais. Il est décidé de réduire la commande d'abord à 16 exemplaires pour la cavalerie mais il est question ensuite de rompre le contrat. Après négociation avec Renault, le contrat de 25 châssis d'ACG1 est réduit à 10. La commande de 25 tourelles est conservée. Les belges utiliseront les 15 tourelles supplémentaires comme bunkers, 13 le long de la cote et 2 à Sougné-Remouchamps, près de la ville de Liège.
Au printemps 1939, le 3e GAM, stationné à Paris reçoit 1 lot de chars. Ils n’y resteront pas longtemps car fin aout 1940, ils sont démobilisés à cause des nombreux problèmes mécaniques. On prévoit d'armer alors les nouveaux 4e et 5e régiment d'automitrailleuse (RAM, évolution des GAM en régiment) de Division de cavalerie mais les H35 sont privilégiés. Les AMC 35 en état sont placé en parc jusqu'en 1940.
Les 10 chars à destination de la Belgique sont livrés en 3 lots en 1939. Ils ne sont pas encore aptes au combat et doivent encore être armée et subir des travaux internes ... Un escadron de Corps de Cavalerie, en abrégé esc. ab.l./C.C, est formé à proximité de Bruxelles. Les hommes s'entrainent avec les chars tout près de l'usine où ils sont en travaux à Gand. Au l'aube de la guerre, l'escadron se compose de 8 chars divisé en 2 pelotons et un peloton de commandement et soutien. 2 chars doivent être en réserve mais sont en réparation au début des hostilités.
Les chars au combat
En Belgique, le 10 mai 1940, l'escadron est mobilisé. Les 2 chars en travaux sont démontés pour fournir des pièces détachées. Les carcasses sont laissées sur place. D'abord l'escadron patrouille au nord de Bruxelles pour contrer d'éventuels parachutistes allemands. Puis les chars connaissent leurs premiers combats au nord de Bruxelles le long du canal de Willebroek où le premier char est perdu à cause d'une passerelle ayant cédé sous le poids. Puis ils sont engagés au sud d'Anvers afin de couvrir la retraite d’une division d'infanterie où un char est perdu à Zwijndrecht. Les dernières pertes ont lieu à Kwatrecht, près de Gand, lors d'une offensive pour chasser les allemands de la localité. Lors de la capitulation belge, 3 chars sont encore en service.
En France, en 1940, il y environ 33 à 48 chars AMC 35 en parc.
Au premier jour de l'offensive, le 12e Groupement Provisoire de Cavalerie Motorisé comptant deux escadrons est constitué à la hâte. L'un des escadrons, numéroté 16e escadron, est constitué de 13 AMC 35. Le groupement participe à la défense de la ligne de défense établie par Weygand le long du cours de l'Aisne, puis de l'Ailette, du canal Crozat et de la Somme. Entre le 15 mai et le 27 mai, il est envoyé à Chateau-Porcien sur l'Aisne où ils connaissent leurs premiers combats. Les seules pertes subites sont dues à des soucis mécaniques, 3 chars doivent être renvoyé en réparations. Le 8 juin, les 10 chars attaquent une position allemande sur un lieu-dit la ferme de Mont Soisson. C'est un massacre, 4 sont détruit lors de l'offensive et lors de la retraite, et 1 est détruit par une attaque aérienne, tandis qu’1 perd une chenille et est abandonné.
Un dernier char est perdu à lieu le 10 juin où la mécanique rend l'âme mais le char en envoyé en réparation. Les survivants se replient définitivement du front.
Le 21 mai 1940, on commence à constitués des Groupes Francs Motorisés de Cavalerie, souvent appelé seulement Groupe Franc. 5 Groupes sont prêt début juin équipés avec le matériel disponible, Somua S35, AMC 35, AMD Panhard, Hotchkiss H39, canons automoteurs Laffly… En théorie, ils se composent d'un peloton de moto, 2 pelotons de blindé (une d’automitrailleuse et un de chars), deux groupes antichars et une section d'infanterie. Mais ça ne sera le cas que pour le 1er et 3e Groupes. Le 1er et le 4e sont équipés d'AMC 35 pour leur peloton de chars, 7 chars pour le 1er Groupe et 3 pour le 4e. La participation des AMC au combat est, pour l'instant peu documenté. Fin mai, le 1er Groupe participe à la défense de la ligne Weygand puis se replie sur la Loire où il participe à la bataille de Saumur.
Le 4e Groupe est envoyé début juin à Igoville, en avant de Pont-de-l'Arche, le long de la Seine où il doit retarder l'ennemi. Seul 2 chars sont disponibles, le troisième étant panne. Les 2 blindés sont abandonnés sur place, les équipages devant traversé à la nage la Seine car le pont reliant Igoville à Pont-de-l'Arche avait sauté.
Au final, l'AMC 35 a combattu très brièvement le long de la campagne des 18 jours et la campagne de France. Vu le faible, nombre ce n'est pas étonnant. Les combats relèveront les défauts déjà constatés. Une mécanique fragile et exigeante en maintenance qu'un manque d'unité de maintenance et de réparation au sein des unités surtout chez les français oblige à chaque fois de les renvoyer en parc. Son faible blindage le rend très vulnérable au simple canon anti-char Pak 36 allemand surtout lors d'offensive sur des position ennemi.
Après-guerre, les Allemands exhiberont un des chars en trophée. Nommé PzKpfw AMC 738 (f) ils utiliseront les survivants comme char d'école. Les tourelles belges placé le long de la coté sont récupéré par les allemands et deviendront des éléments du futur mur de l'Atlantique.
Aujourd'hui, on peut voir un AMC 35 restauré au musée de Saumur, et deux tourelles belges une sur son support à Sougné-Remouchamps et une, qui était occupait anciennement la côte belge, au musée de la Bastogne-Barracks
Sources:
"Cavalerie Mécanique 1940", magazine GBM hors série n°1, décembre 2013-janvier 2014
F.Vauvillier, "Le Sublime échec de l'AMC 35", magazine GBM n°123, janvier-févriers-mars 2018, p.43-58
M.Comas, "Juin 1940, L'Absurde Massacre de l'Escadron Audigier" magazine GBM n°126, octobre-novembre-décembre 2018, p.73-80
G.E.Mazy et F.Vernier, "Les chars Renault ACG-1 de la cavalerie belge: Mai 1940", Editions du Patrimoine Militaire, 2015
char-français.net, "1935 RENAULT AMC 35 ACG 1" : https://www.chars-francais.net/2015/index.php/engins-blindes/automitrailleuses?task=view&id=691
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- SokolovFondateur et administrateur [REM]
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Re: AMC 35 Renault
Dim 25 Oct 2020 - 9:51
Bravo Vincent
destroy500 aime ce message
Re: AMC 35 Renault
Mer 28 Oct 2020 - 13:29
Ce que je retiens, c'est l'économie entre les Belges et les Français : pleine de rebondissement… et de retards (comme sur les chantiers) !
- destroy500Officier [REM]
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Re: AMC 35 Renault
Mer 28 Oct 2020 - 20:12
merci pour vos post
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